Bassin à l'aiguière, Transoxiane, 11e siècle

Approche technique

Ce bassin est constitué de protofaïence. C’est une pâte siliceuse avec une texture très fine, non poreuse. Pour la technique de façonnage utilisée nous pouvons émettre deux hypothèses : le tournage ou l’estampage.

C’est une céramique argileuse engobée à décor d’engobe sous glaçure transparente. Ce décor est peint dans une gamme rouge brique aux tonalités claires et foncées qui fait abstraction de la forme même de la pièce et se développe en hauteur.

dimensions

estampage

tournage

Dans ce récipient, le décor domine sur la forme globale. Les décors sont disposés de manières précise et très géométrique.

une composition en grille

un centre dominant

symétrie axiale

deux coupelles, Transoxiane, Samarcande, 10e siècle, collection privée, Paris

Contexte

L’empire islamique, à mi-chemin entre la Chine et l’Europe est une culture qui se développe au carrefour des voies de communication avec des influences multiples. Ainsi la pluralité des cultures favorise l’apparition de cet art complexe aux multiples facettes.

La prise des pouvoir des Abbassides (environ 740) fait suite à l’État Umayyades qui perd alors de sa puissance. Il y a une expansion territoriale de l’empire due à une armée perfectionnée. L’État est centralisé et Bagdad en est le lieu phare, avec grâce a la route de la soie des influences persanes, grecs, indiennes et même chinoises. Une prospérité culturelle marque donc l’âge des Abbassides. La langue arabe joue un grand rôle dans cette unité.

Approche sémantique

On peut dire que tout dans cette coupe est représentatif de la gloire du monde islamique sous le règne des Abbassides.

 

Objet dont le profil et les décors paraissent souvent proches de l’orfèvrerie, l’aiguière est utilisée pour tempérer l’eau que l’on verse, on peut lui attribuer la symbolique de la patience, de la prudence. Elle est caractéristique avec le bassin des objets utilisés dans le rite du lavage des mains dans plusieurs pays où cela fait partie d’un rituel religieux.

Albarelle à décor épigraphique hispano-mauresque, 15e-16e siècle

Aiguière

La calligraphie rappelle les écritures coufiques et les décors épigraphiques omniprésents dans l’art islamique faisant parfois référence à certains versets du coran. Dans « le bassin à l’aiguière » le mot central semble être « prospérité ».

La palmette est un motif ornemental et décoratif en forme de feuille de palmier. Les  palmettes peuvent prendre différentes formes on dit grasse quand elles sont larges et lobées quand elles sont au contraire plus effilées. On peut y retrouver la référence aux Jardins Sacrés, symbole de la promesse d’infini dans la religion de culture islamique. Universellement considérée comme un symbole de victoire.

Approche fonctionnelle

Ce contenant dit « Bassin à l'aiguière » est un contenant à eau servant à faire ses ablutions. En effet, cette appellation familière de la toilette est très ancienne. Elle est dérivée de pratiques religieuses. Ablution vient du latin « abluto » issu du verbe « abbluere » qui voulait dire « laver ». Dans de nombreuses religions l’ablution est un acte rituel de purification de l'eau.

Chez les Musulmans, par exemple, l'ablution avant la prière est obligatoire. Elle doit être faite avec de l'eau (ou de la terre propre si l'on est en voyage). Dans chaque mosquée, il doit y avoir une salle des ablutions qui isole la salle de prière du monde profane. Ils doivent respecter ce rituel puisque c'est le prophète Allah qui le dit. En échange tous les péchés sont effacés.

Ici le rapport usage/forme est important puisque ce contenant servait aussi à mettre en valeur les mets. Cette forme évasée convient à cette fonction. La matière avait aussi un impact important.

L'évolution de la palmette dans le monde islamique

L'introduction au palmier dattier tient une place centrale dans la culture du moyen orient puis se reprendra en Europe à partir du 8e siècle. Le palmier des oasis va rester attaché à la représentation exotique de l'orient, la palmette en est le symbole.

On relève dans le Coran la mention du miracle du palmier ("La Sourate XIX") : Alors que la mère du Christ se lamente d'être isolée, l'enfant lui dit : "Ne t'attriste pas ! Ton seigneur a fait jaillir un ruisseau à tes pieds. Secoué vers toi le tronc du palmier, il fera tomber des dattes fraîches et mûres".

Petroglyphes

Assyrie, pollinisation d'un palmier, Musée la Haye

La palmette, branche du palmier ou synthèse de celui ci est de prime-abord représentée très schématisée puis se développe avec plus de précision et de réalisme au fil des années.

Sa symbolique religieusement l'amène à être présente sur certaines pièces avant les abbassides, mais c'est sous cette période que le motif prends son ressort avec de multiples coupes aux palmettes illustrant la puissance politique et le rayonnement du monde musulman de ce moment que l'on peut voir de par son expansion géographique impressionnante.

Coupe abbassides, Irak, 9e siècle

Coupe, Iran, 10e siècle

Coupe aux palmettes, Nichapour, 11e siècle

À partir du 13e siècle, la palmette devient plus fantaisiste se mêle aux entrelacs et aux écritures coufiques des pièces aux tons bleus-turquoises de style iznik. Au delà de l'aspect esthétique, de la participation à une abondance visuelle de peur du vide, la palmette représente ici l'importance de la nature et le culte du jardin.

Ainsi, la palmette devient au fil du temps symbole de la puissance culturelle du monde islamique à travers cette espèce endémique qu'est le palmier dattier. Le motif se reprendra largement à travers des époques et les situations géographiques différentes.

Grand plat aux palmettes, Iran, 17e siècle

Plaque commémorative, Perse, 13e siècle

Étoile de revêtement, Kashan, 14e siècle

Grèce

Assyrie

Arabe

Égypte

Rome

Romane

Renaissance

Louis XIV

Empire

Déclinaison de la palmette

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